Faisant suite à notre article « Coronavirus – Approches Thérapeutiques » dans lequel la piste des Antiviraux a été examinée, nous abordons ici d’autres approches actuellement déjà en cours d’exploration par la communauté scientifique – Anticorps Monoclonaux, Vaccins & Autres Approches
De quoi s’agit-il ? – Quel est leur Mode d’Action ? – Quelle durée de développement probable ?
5 approches thérapeutiques principales
- Antiviraux (voir « Coronavirus – Approches Thérapeutiques » )
- Anticorps (monoclonaux)
- Stimulants de la Réponse Immunitaire (voir « Coronavirus et Interféron« )
- Vaccins
- Autres approches
Les Anticorps Monoclonaux
A côté des mécanismes et acteurs de l’Immunité Naturelle ou Innée (non spécifique) – cellules phagocytaires et Interférons par exemple – qui constituent la première ligne de défense de nos cellules contre les microbes et autres envahisseurs, les organismes supérieurs ont développé d’autres mécanismes plus sophistiqués qui forment l’Immunité Spécifique (ou à mémoire). Ceux-ci vont contribuer à déclencher une réaction spécifiquement dirigée contre le virus, la bactérie ou autre pathogène, entraînant généralement sa destruction. L’immunité acquise au contact de l’agent infectieux conservera la « mémoire » de ce dernier, prévenant toute réinfection ultérieure par le même germe.
Bien que l’Immunité Spécifique fasse intervenir de nombreuses acteurs, cellules et molécules différentes, on y trouve 2 acteurs particulièrement importants: les Anticorps et les Lymphocytes B (ou plus exactement les plasmocytes), les cellules qui les produisent.
Les Anticorps sont des molécules médiatrices qui vont se fixer sur les agents pathogènes (antigènes) préférentiellement, ce qui empêchera ces derniers de s’accrocher à la membrane de la cellule et de l’infecter.
Les anticorps ont également d’autres fonctions telles que l’activation du Complément (un ensemble de molécules – au moins 35- capables de lyser (détruire) les membranes cellulaires de nombreuses bactéries) ou encore se fixer par une extrémité à une cellule phagocytaire qui absorbera le pathogène (lui même fixé à l’autre extrémité de l’anticorps).
Ces 2 derniers mécanismes font partie de l’Immunité Naturelle, ce qui montre qu’en fait Immunité Spécifique et Non-spécifique agissent de façon concertée – les anticorps aidant les cellules phagocytaires à identifier leur cible. Il s’agit de mécanismes de défense intégrés.
Structure d’un Anticorps
Il s’agit de glycoprotéines ayant une forme en « Y » et formées de quatre chaînes polypeptidiques : deux chaînes légères (environ 200 acides aminés chacune) et deux chaînes lourdes (environ 450 acides aminés chacune). Les anticorps font partie de la famille des Immunoglobulines avec lesquelles on les identifie souvent, bien qu’il y ait beaucoup d’autres immunoglobulines. Il existe 5 classes d’anticorps : les IgM, les IgG, les IgA, les IgE et les IgD et plusieurs sous-classes mais dans l’ensemble leur structure est assez similaire.
On y reconnaît 2 parties principales – le Fragment Fab, lieu de fixation à l’Antigène (par exemple le Virus) et le Fragment Fc qui se fixe aux cellules de l’hôte infecté, par exemple aux phagocytes ou qui interagissent avec des molécules du Complément.
Par ailleurs, l’extrémité Fab des 4 chaînes présente une haute variabilité dans leur composition en acides aminés ( la Région Variable) qui permet à ~10 millions de chaînes légères différentes de se combiner à ~10 millions de chaînes lourdes, ce qui crée théoriquement ~100 millions d’anticorps différents capables de reconnaître les millions de déterminants antigéniques qui existent dans la nature (souvent plusieurs sur chaque virus).
Les Anticorps monoclonaux
En réalité, un pathogène comme un virus présente plusieurs types de molécules de surface à caractère antigénique et de plus chacune d’elles peuvent constituer plusieurs antigènes. C’est donc non pas un seul anticorps qui va être produit en présence du virus mais un mélange de plusieurs qui n’auront pas nécessairement tous la même efficacité contre le germe (c’est ce qui se passe lors d’une vaccination).
La technique thérapeutique des anticorps monoclonaux développée vers 1975 consiste à produire non pas un mélange mais un seul anticorps préalablement sélectionné pour avoir les meilleures propriétés ou efficacité et qui administré au patient aura le plus de chance d’éliminer le pathogène.
En pratique, cela consiste à faire produire des anticorps humains par des plasmocytes (lymphocytes B) d’une souris, à les prélever et les multiplier in-vitro avec leur production d’anticorps.
Les Anticorps Monoclonaux et leur Intérêt Thérapeutique
Nous verrons dans la partie dédiée aux Vaccins que le corps humain a besoin de temps entre le moment ou il est pour la première fois en contact avec un nouvel antigène et celui ou des anticorps contre celui-ci sont produits et disponibles en quantité suffisantes afin de l’éliminer. Cela peut prendre de l’ordre de 7 à 10 jours, comme illustré ci-dessous.
Lorsque l’antigène est apporté par un vaccin, ce n’est pas bien grave puisque en principe la personne est à ce moment en bonne santé…il en est tout autrement si ce premier contact est réalisé directement par l’infection par un agent pathogène comme le Covid-19 par exemple.
Bien que l‘Immunité naturelle (phagocytes, Interférons,…) puisse souvent contrôler et éliminer le pathogène à elle seule, et finalement l’Immunité spécifique, avec ses anticorps servira plutôt lors de l’exposition suivante ou la réponse sera beaucoup plus rapide grâce à la mise en mémoire des cellules B et de leurs anticorps spécifiques à ce germe.
Malheureusement, dans certains cas, le virus peut déborder les défenses de premières lignes et rendre gravement malade la personne avant que les anticorps soient disponibles en quantité suffisante.
C’est là l’intérêt d’un traitement par Anticorps monoclonaux. Apporter très vite des anticorps efficaces en attendant que le corps prenne la relève. |
Anticorps monoclonaux et Coronavirus
En attendant qu’un vaccin soit développé, ce qui prendra au mieux un an ou peut-être plusieurs années, ces dernières semaines plusieurs laboratoires et gouvernements ont encouragé la piste des Anticorps monoclonaux afin d’aider les patients dans l’intervalle.
Le gouvernement américain a annoncé début février un partenariat avec l’entreprise Regeneron qui a déjà à son actif un traitement de trois anticorps monoclonaux qui a permis l’année dernière d’améliorer de manière significative le taux de survie de patients touchés par le virus Ebola en République démocratique du Congo ainsi qu’un autre contre le syndrome respiratoire du Moyen-Orient provoqué par le virus MERS-COV, proche du SARS-COV-2, responsable de la maladie Covid-19.
Au Canada, le Centre de recherche en infectiologie de l’Université Laval, a identifié des millions d’anticorps différents dirigés contre le SRAS-COV-2, dans des échantillons sanguins prélevés chez des personnes ayant été atteintes de la COVID-19 et ayant guéri.
L’étape ultérieure consistera à identifier 3 anticorps particulièrement efficaces contre le virus pour en faire un traitement. Avec 3 anticorps monoclonaux, il est improbable que le virus puisse muter 3 fois afin d’échapper aux anticorps.
En Belgique, l’Institut flamand de recherche en biotechnologie (VIB) aurait découvert un anticorps capable de neutraliser le virus à l’origine du Covid-19 et qui pourrait être à la base d’un traitement.
Les essais étant en cours depuis plusieurs semaines, on peut espérer des résultats dans les prochains mois, du moins en laboratoire et disponibles seulement pour quelques patients car comme déjà évoqué la mise à disposition de masse nécessitera la création de capacité de production, ce qui nécessitera aussi plusieurs mois voire en années.
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