Révolution Biotechnologique -Applications en matière de Longévité : Agir sur les Gènes du Vieillissement

Nous terminions notre article précédent (voir ci-dessous*) en constatant qu’étant donnée la complexité de la machinerie biologique humaine, nous sommes encore loin d’une connaissance exhaustive du rôle joué par chacun de nos 22 000 gènes – par nos 100 000 à 1 000 000 de protéines et sans doute une fois autant d’ARN dits non-codants mais qui pourtant agissent directement sur la biochimie cellulaire.


Néanmoins, on a déjà pu identifier un certain nombre de gènes – et les protéines qu’ils codent – qui jouent un rôle clé dans le vieillissement et dont la compréhension de leur action peut être intégrée à une démarche de Longévité.

L’objet de cette contribution est de faire l’inventaire de ces gènes et de la manière concrète d’en tirer parti.

(*) La Révolution Biotechnologique au service de la Longévité : Thérapies géniques – Séquençage de l’ADN – Ciseaux moléculaires CRISPR/Cas9

Klotho – Foxo – mTor : pas des dieux légendaires mais peut-être les gènes de l’immortalité !

La majorité de ces gènes appartient à la voie de signalisation de lInsuline et de la Somatomedine-C aujourd’hui plus souvent appelée IGF-1 (insulin-like growth factor).
Ces deux hormones de structure assez similaire jouent un rôle crucial dans la croissance et la reproduction.

Elles pourraient constituer une passerelle entre métabolisme, croissance, reproduction et longévité.

En effet, les études sur les animaux ont montré que les régulations de la croissance, de la reproduction et de la longévité semblent intimement liées.

Tout l’enjeu est donc d’accroître la longévité sans affecter la croissance – ou le maintien de la stature chez l’adulte – ni la fertilité.

Concrètement, la réponse semble passer:

D’une part, par une inhibition de la voie de signalisation de l’IGF en intervenant au niveau des récepteurs cellulaires (IGF-1R) de cette hormone ou en aval càd sur les molécules initiées par ceux-ci.

Intervenir en amont – par exemple en diminuant le taux d’Hormone de Croissance qui stimule la production du facteur de croissance IGF-1 – aurait un impact négatif sur la croissance et la reproduction.

Voie de Signalisation de l’IGF-1.

Durée de vie, génétique et axe somatotrope
M/S Revues

Laurent Kappeler,Carlos De Magalhaes Filho,Yves Le Bouc et Martin Holzenberger

Et d’autre part, en maintenant la sensibilité cellulaire à l’insuline qui a tendance à diminuer avec l’âge.


Relation entre les gènes Klotho, Foxo et les hormones IGF-1 et Insuline.

Le produit du gène Klotho – la protéine Klotho – est lié à la membrane des cellules mais est aussi présente sous forme soluble et elle agit alors comme une hormone à distance sur divers organes.

Sa concentration dans le sang diminue avec l’âge, ce qui serait associé à plusieurs affections observées au cours du vieillissement, telles que cancer, diabète, hypertension,…

On estime que ses effets anti-vieillissement sont liés à:

  • Le contrôle de l’inflammation et du stress oxydatif
  • L’amélioration de la sénescence cellulaire
  • La préservation des cellules souches assurant le renouvellement cellulaire

Le rôle essentiel dans le vieillissement et la longévité du gène Foxo a aussi été révélé dans des études récentes (Nature automne 2017) .

L’unique gène Foxo retrouvé chez l’hydre (polype d’eau douce) participe à sa quasi immortalité en assurant le renouvellement de ses cellules souches. Chez les organismes supérieurs, les gènes Foxo se sont multipliés au cours de l’évolution et leurs fonctions se sont diversifiées.

Chez l’homme, cette famille de gènes contrôle ou est impliquée dans des mécanismes biochimiques essentiels tels que:

  • La réparation des dégâts moléculaires, notamment de l’ADN
  • L’élimination des molécules endommagées
  • La protection contre le stress oxydant
  • L’élimination des cellules sénescentes & la maintenance des cellules souches
  • La régulation du système immunitaire et des mécanismes de l’inflammation
  • L’inhibition de la prolifération des cellules cancéreuses

L’ensemble de ces activités s’oppose directement aux mécanismes du vieillissement.

En raison de sa position stratégique au sein des voies biochimiques intracellulaires, le gène Foxo3 paraît jouer un rôle de premier plan dans les mécanismes moléculaires de la longévité. Chez l’homme, on a retrouvé une association entre certains variants du gène Foxo3 et une grande longévité.

Connexion entre les gènes Klotho & Foxo et l’Insuline & IGF-1?

Les facteurs de transcription FOXO restent dans le cytoplasme quand le niveau d’insuline et d’IGF-1 est élevé, ce qui les empêche d’agir. En revanche, quand le niveau d’insuline et d’IGF1 est bas, les facteurs de transcription FOXO sont transportés dans le noyau où ils induisent l’expression de gènes impliqués dans la détoxification des radicaux libres et la réparation de l’ADN, ce qui accroît la durée de vie.

C’est là qu’intervient la protéine Klotho, en inhibant l’effet négatif de l’Insuline et de l’IGF-1 sur la production de FOXO et en lui permettant d’exercer son effet anti-vieillissement.

Pouvoir anti-vieillissement de la protéine Klotho via inhibition des effets de l’IGF-1 / Insuline et stimulation du gène Foxo qui réduit le stress oxydatif.

Durée de vie, génétique et axe somatotrope
M/S Revues

Laurent Kappeler,Carlos De Magalhaes Filho,Yves Le Bouc et Martin Holzenberger


mTOR, un gène promoteur du vieillissement

Un des rôles majeurs de mTOR (Mammalian Target of Rapamycin) est d’adapter la croissance et le métabolisme cellulaires aux conditions environnementales, notamment à la disponibilité des nutriments et à la présence de facteurs de croissance. Le dérèglement de la voie mTOR est impliqué dans la progression des cancers, du diabète mais également dans le processus de vieillissement. Entre autres effets biologiques, l’activation de mTOR :

  • Augmente la synthèse des protéines
  • Inhibe le processus d’autophagie permettant l’élimination des molécules endommagées
  • Diminue le renouvellement de certaines cellules souches
  • Affecte la transcription de gènes impliqués dans la protection contre le stress oxydant

Le gène mTOR est activé par l’Insuline, les facteurs de croissance (IGF-1,..) et les Aliments.

L’inhibition de mTOR par la rapamycine, une molécule aux propriétés immunosuppressives et  anticancéreuses, augmente significativement la durée de vie chez la levure, le ver, la mouche mais également chez la souris.

Il semble que l’effet anti-vieillissement produit par l’inhibition de TOR soit dû au maintien de la qualité des protéines intracellulaires par l’activation des mécanismes d’autophagie. Quant à la maintenance des cellules souches, elle paraît d’avantage liée à l’augmentation de la protection contre les molécules oxydantes que par une autre activité  anti-vieillissement.


Comment Agir Concrètement sur ces Gènes de Longévité ?

Les mécanismes décrits ci-dessus suggèrent les deux approches complémentaires suivantes :

Ralentir la voie métabolique insuline/Igf1 (IIS)

L’action la plus reconnue par les scientifiques est la restriction calorique, c’est à dire manger 30% de moins environ que sa ration calorique « normale ».

Ceci entraîne une diminution en IGF-I plasmatique et une augmentation de la sensibilité à l’insuline.

D’après les études récentes de chercheurs comme le Pr V Longo, la réduction des protéines serait encore plus impliquée que celle des calories (voir Le Régime de Longévité (Ed. Actes Sud 2018).

Certaines substances naturelles ont aussi démontré un effet réduisant la voie IIS et favorisant la sensibilité à l’insuline, à savoir Thé vert, Nicotinamide riboside, Curcumine du curcuma, Tréhalose (sucre naturel synthétisé par certaines bactéries & champignons),…

De manière concrète, nous vous renvoyons à notre Programme de Longévité Cognitive et plus spécifiquement à son Axe 1 : l’Alimentation des Centenaires qui vise un état nutritionnel appelé « la Cétose légère » afin de passer d’un mode principalement Brûleur de Glucides et Protéines à un mode principalement Brûleur de Lipides (Graisses).

Réguler la voie mTOR

mTOR joue un rôle important au sein de nos cellules mais il faut l’utiliser de la manière la plus bénéfique pour notre corps c’est à dire:

* Activer mTOR pendant les périodes d’exercice afin de maximiser la croissance musculaire.
* Maintenir les niveaux mTOR bas à d’autres moments pour promouvoir la santé et la longévité.

Activer mTOR par l’Exercice physique

L’exercice physique stimule mTOR dans le cerveau et les muscles mais l’inhibe dans le foie et les cellules adipeuses.
C’est la raison pour laquelle il faut consommer des protéines directement après l’exercice pour maximiser la croissance musculaire….mais en limiter la consommation par ailleurs.

Inhiber mTOR par l’Alimentation de Longévité

LAlimentation de Longévité préconisée à l’Axe 1 de notre Programme de Longévité Cognitive contribue à maintenir des niveaux bas de mTOR en limitant l’apport en protéines et de glucides en en augmentant les bonnes graisses.

La Restriction calorique a aussi démontré un effet inhibiteur sur mTOR mais est difficile d’application dans notre culture occidentale . L’alternative pourrait consister en un complément alimentaire naturel, la Berbérine, qui stimulerait les mêmes mécanisme que la restriction calorique mais elle n’a pas démontré son innocuité, notamment parce qu’elle renforce les effets des traitements contre le diabète, l’hypertension,etc…

On lui préférera les apports suivants, soit par leur présence naturelle dans l’alimentation, soit en compléments alimentaires:

  • Le resvératrol (raisin, baies, vin rouge,…)
  • L’ECGC du thé vert
  • L’acide alpha-lipoïque
  • Le coenzyme Q10
  • La curcumine (curcuma)
  • La quercétine (fruits, légumes, céréales)

En conclusion

Nous démarrions cet article sur le constat de l’extrême complexité de la machinerie biochimique humaine que ne détrompent pas les quelques mécanismes décrits ci-dessus.

Améliorer notre longévité en agissant directement au niveau cellulaire relève à l’évidence d’une approche globale mais l’ensemble des premiers résultats démontrent la validité des enseignements obtenus de manière empirique, parfois depuis très longtemps par les médecines indienne (ayurvédique) ou chinoise c’est à dire:

Un changement de mode de vie associant:

  • Une alimentation de type cétogène combinée au jeûne intermittent
  • Une activité physique régulière et une diminution du stress
  • Une supplémentation en nutriments spécifique
  • Le maintien des taux hormonaux

Ces axes d’action sur le ralentissement du vieillissement constitue le coeur de notre Programme de Longévité Cognitive que vous pouvez démarrer dès aujourd’hui en attendant que d’autres gènes déjà au centre de l’actualité tels que SIRT 6, Chrna 3/5,…enrichissent nos connaissances et méthodes de lutte contre le vieillissement.